Mieux vaut en rire, 18 avril 2020

Elle vendait des cartes postales et puis des crayons. Depuis elle colore le monde.
Elle vendait des cartes postales et puis des crayons. Depuis elle colore le monde.

 

18 avril
Aujourd’hui, c’est à toi, petite fille, que j’adresse cette lettre. Je ne sais pas si l’histoire que j’ai lue dans la presse est authentique, les journalistes écrivent tant de choses et trop souvent n’importe quoi. Mais comme j’ai envie d’y croire, je fais comme si c’était vrai, qu’un matin de bonne heure, sur la Promenade des anglais, un policier t’a découverte, seule, traînant ta valise.
De quelle planète es-tu tombée pour ne pas savoir qu’ici, nous sommes tous confinés et que personne n’a le droit de se promener sur ce qu’est justement une promenade ?
J e ne sais pas si tu as eu peur de voir un policier t’aborder, on n’a pas toujours la conscience bien tranquille n’est-ce-pas. Peut-être as-tu simplement confondu son uniforme avec celui d’un aviateur et un aviateur c’est plutôt rassurant.
Et, quand il t’a demandé, un peu fermement sans doute, de monter dans sa voiture, tu as eu un moment d’hésitation en te rappelant les conseils que l’on t’avait donnée de ne jamais suivre un monsieur que l’on connait pas.
Mais, peut-être ce policier-là t’a paru digne de confiance. Il avait l’air bienveillant à ton égard. Sur le tableau de bord de sa voiture il y avait la photo de ses enfants, du même âge que toi.
Alors, tu t’es assise bien sagement sur la banquette arrière comme il se doit lorsqu’on n’a que sept ans en gardant ta main serrée sur la poignée de ta valise posée à côté. Tu t’es bien demandé où il t’emmenait mais la promesse d’un bon chocolat chaud avec des biscuits t’a rassurée. Il était encore tôt et tu n’avais pas encore déjeuné.
Vous rouliez depuis un petit moment déjà quand ton chauffeur t’a regardée dans son rétroviseur. Tu ne le quittais pas des yeux, tout intimidée. Jusque là il n’avait pas dit grand-chose il ne t’avait même pas demandé ton nom. Mais chez un policier, chassez le naturel, il revient au galop comme dit l’expression que la maîtresse t’avait expliquée à l’école.
Ainsi, après t’avoir observée un instant presque furtivement comme s’il craignait de te brusquer et de te voir fondre en larmes, il t’a tout de même demandé ce que tu faisais là, à cette heure, sur la Promenade des anglais.
Tu lui as répondu aussitôt de ta petite voix cristalline que tu voulais « donner de l’amour à la planète pour la débarrasser du coronavirus ».
Petite princesse, je ne sais pas comment tu t’appelles, alors on dirait que ton prénom est Marianne, et j’aimerais bien que demain les bustes qui ornent nos mairies aient ton visage.