9 avril
Aujourd’hui, nous disait-on, Jupiter descend de son Olympe. Puis, en raison de
l’embouteillage pascal dans les cieux, il devra patienter en salle d’embarquement.
Au début de cette épidémie, j’ai eu une pensée émue pour tous ces gouvernants
que je plaignais un peu tout de même. Ça n’allait pas être une sinécure pour eux en ces temps difficiles. Et je me félicitais de ne pas être à leur place ni ne les enviais.
Puis, le temps passant, je me suis dit que j’avais grand
tort de m’apitoyer sur leur sort. Non pas
qu’ils fussent eux-mêmes à l’abri de la contagion. En réalité, leur tache en était grandement facilitée.
Avant, un politicien devait son succès, son élection ou sa réélection, à la plus ou moins grande crédibilité de ses promesses. Des promesses, ils n’en étaient pas avares, tout en sachant
pertinemment qu’une fois élus, ils ne les tiendraient pas, non parce qu’ils nous auraient délibérément menti mais parce que, arrivés au pouvoir, ils allaient découvrir le poids des contraintes
qui les empêcheraient de les accomplir. Ils devaient alors se livrer à d’incroyables pirouettes pour nous persuader de leur bonne foi. C’est la faute à ceci, la faute à cela. Et nous
d’opiner.
Aujourd’hui, c’est évidemment beaucoup plus facile pour eux. Nul ne songe à leur reprocher leur impuissance devant un tel fléau qu’ils ne peuvent pas plus éradiquer qu’ils ne l’avaient prévu.
Leurs métaphores de guerre, de pics, de vagues nous font tout juste sourire ou grimacer quand on sent qu’ils préféreraient nous crier la vérité « sauve qui peut ». Ils ne nous avaient pas promis
de nous sauver du péril. Ils n’ont pas cette promesse- là à tenir.
Après, parce qu’il y aura bien un après, Chronos, autre dieu de l’Olympe y veillera, -un jour ou l’autre- que se passera-t-il ? Lorsque nous serons tous guéris. Je veux dire, guéris de notre
crédulité. On recommencera comme avant ? Peut-être. Mais peut-être aussi que nous leur dirons « tout bien confiné, vous ne servez à rien. Et puisque le confinement est une aussi bonne méthode,
allez-vous confinez vous-mêmes et surtout, ne venez plus nous échauffer les oreilles ni le jeudi ni le lundi, ni à Pâques ni à la Trinité. Les Champs Elysées (ceux de la mythologie) sont prêts à
vous accueillir tous, dieux et demi-dieux. »
Pour notre bonheur, que nous reste Aphrodite, qui continuera à nous faire rêver.